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Marques : attention aux indications géographiques trompeuses.

Malgré les règles strictes encadrant l’enregistrement des marques, la tentation des marketeurs est grande et ils n’y résistent pas longtemps, de baptiser tel produit ou service du nom d’un endroit célèbre et s’approprier ainsi, par un parasitisme facile et confortable, la renommée et le prestige de ce lieu, au risque, souvent méconnu d’ailleurs, d’entraîner leurs clients dans des difficultés sans nom…

Sur l’utilisation ou la référence à un lieu à titre de marque, l’article 3 Annexe III de l’accord de Bangui précise déja : « Une marque ne peut être valablement enregistrée si … elle est susceptible d’induire en erreur le public ou les milieux commerciaux, notamment sur l’origine géographique, la nature ou les caractéristiques des produits ou services considérés ; »

Par exemple, la marque « Assinie« , enregistrée à l’OAPI sous le numéro 090684, constitue la reproduction servile du nom d’une localité du sud-est de la Côte d’Ivoire, relevant du département d’Adiaké, dans la Région du Sud-Comoé. Cette commune, située à 94 km à l’est d’Abidjan, est une station balnéaire réputée et huppée abritant des réceptifs hôteliers et résidences privées de luxe. Son nom projette sans doute une image enviable, au point qu’un producteur d’eau minérale a choisi de se l’approprier comme marque pour désigner son produit.

La première difficulté, évidente, est que l’appropriation du nom d’une localité interroge quant à sa disponibilité et à la faculté de ses autorités de s’y opposer, si celle-ci est survenue sans leur consentement. Mais encore faudrait-il que les collectivités territoriales aient connaissance de leurs droits en la matière et aient une volonté de les protéger et, surtout de les valoriser. L’on connaît, sous d’autres cieux, les « success stories » de collectivités qui, ayant protégé leurs noms, ont obtenu des fortunes par des stratégies adaptées de valorisation.

La seconde difficulté, plus sérieuse, est liée au fait que cette marque, Assinie, est trompeuse lorsqu’elle est utilisée pour désigner une eau dont la source, selon son producteur, vient « des profondeurs de la ville de Bonoua » où elle est produite. La ville de Bonoua est située à 41 kilomètres d’Assinie qui n’est finalement en rien concernée par cette eau minérale…

Enfin, de manière plus décisive, l’article 3 annexe VI de l’Accord de Bangui portant protection des indications géographiques interdit tout enregistrement d’une marque contenant ou constitué d’une indication géographique  : « Est refusé ou invalidé tout enregistrement d’une marque de produits qui contient, imite une indication géographique ou est constituée par une telle indication ou imitation, si l’utilisation de cette indication dans la marque de produits pour de tels produits est de nature à induire le public en erreur quant au véritable lieu d’origine. »

La même annexe édicte également en son article 6-4 : « Est illicite, l’utilisation dans la désignation ou la présentation d’un produit, de tout moyen qui indique ou suggère que le produit en question est originaire d’une région géographique autre que le véritable lieu d’origine d’une manière qui induit le public en erreur quant à l’origine géographique du produit. »

Le ton péremptoire de l’article 3 susvisé suggère que l’OAPI dispose du pouvoir de refuser ou invalider d’office de tels enregistrements dont l’annulation peut toujours être obtenue devant les juridictions des Etats membres.

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